Le 13/02/2020 par Amel Boulakchour
Si une ville devait résumer l’histoire syrienne ce serait elle : Bosra. Entre héritages nabatéens, romains, chrétiens ou islamiques, la ville résume à elle seule la diversité des influences qui ont traversé une région toute entière.
D’abord capitale de la province romaine d’Arabie, puis étape incontournable de la route vers la ville sainte de La Mecque, la ville a su préserver des héritages divers. Située au sud de la Syrie et aux portes de l’Arabie saoudite, la ville devient rapidement le carrefour des routes caravanières venant d’une part d’orient et d’autre part de la Méditerranée. Un emplacement stratégique qui lui a permis de demeurer une ville dynamique depuis le IIe siècle. C’est à cette période que la ville est intégrée à l’Empire romain et que son théâtre emblématique est construit. Son urbanisme et son architecture sont aussi diversifiés que son histoire. En 1980, la ville de Bosra est inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco et les archéologues s’y intéressent, en mettant notamment à jour son théâtre.
D’abord, les époques nabatéennes et hellénistiques posent la base de la ville de Bosra notamment sous le règne de Rabbel II. Puis des extensions successives romaines, byzantines et enfin islamiques vont durablement marquer la ville. Une succession de périodes qui toutes ont marqué l’organisation urbanistique et architecturale de la ville syrienne. Contrairement à d’autres sites antiques de la région, la ville de Bosra est aujourd’hui toujours habitée, ce qui rend d’autant plus complexe l’étude de ses vestiges. Cette habitation continuelle de la ville a été notamment permise grâce à un approvisionnement en eau constant par des réservoirs dont le plus important est la source al-Jahîr et un aqueduc dont la période de construction reste encore indéterminée. Cette abondance de l’eau en a fait une région fertile propice au développement de l’agriculture.
Témoin du legs romain, le palais de Trajan est la plus grande demeure de Bosra. Daté de la fin du Ve siècle, cet édifice est incroyablement bien conservé et aurait été habité par de riches notables jusqu’à la période Omeyade. Situé à proximité de la grande église, le palais dispose également de ses bains privés. Ces bains ont été l’objet de fouilles particulière en 2008 et témoignent de l’influence romaine sur la ville. La capitale de l’empire d’Arabie s’est également dotée d’un théâtre emblématique. C’est en effet le plus grand et le mieux conservé de la région. Un autre élément du patrimoine de la ville fait son apparition à cette période : l’art de la verrerie. Il se développe dans l’Empire romain et acquiert ses lettres de noblesse à cette période. Des bouteilles et autres flacons de parfums qui sont aujourd’hui conservés au musée archéologique de Bosra.
Sous l’Empire byzantin, dominé par la religion chrétienne, une église d’envergure a été construite au sud-ouest du palais. De la même manière, la basilique de Bahîra construite entre le IIe et le IIIe millénaire est au cœur d’un monastère nestorien central dans l’histoire des religions. Enfin, la période islamique révèle davantage l’emplacement stratégique de la ville. En effet, elle devient une étape incontournable dans la route vers le pèlerinage vers La Mecque et prend une place centrale dans les échanges commerciaux de la région. Elle devient par la même occasion le théâtre d’affrontements entre l’Empire byzantin et les musulmans pour le contrôle de la Syrie. Elle sera l’une des premières villes conquises par les musulmans en 634. Un nombre considérable de mosquées sont alors construites, témoignage de la présence durable de la religion dans la ville d’abord sous l’Empire Omeyyade puis Ottoman. L’une des plus emblématiques est la Mosquée d’Omar, construite à l’époque Omeyade en hommage au calife sous le règne duquel la Syrie a été conquise par l’Empire omeyyade.
Aujourd’hui, la ville est devenue un site archéologique d’envergure et son théâtre accueille chaque année un festival de musique de la région. Les conflits qui touchent le pays ont également poussé l’Unesco à inscrire, en 2013 la ville sur la liste du patrimoine mondial en péril. Surtout, Bosra constitue un témoignage vivant des différentes influences qui ont traversé l’histoire de la région offrant ainsi un espace représentatif des diversités culturelles et religieuses du pays.