Le 01/03/19/ Par Ilham YOUNES

Eglise de la nativité, Palestine

Selon une définition choisie par l’UNESCO, le patrimoine est l’héritage du passé dont nous profitons aujourd’hui et que nous transmettons aux générations à venir. Il est l’ensemble des monuments, sites, objets et traditions ayant un intérêt exceptionnel pour l’héritage commun de l’humanité tout entière. La particularité du concept du patrimoine mondial est son caractère universel, transfrontalier et non figé. En effet, il est éminemment évolutif au sens où les évolutions économiques et sociales participent à la redéfinition du concept. Le patrimoine renvoie donc nécessairement au passé mais a une dimension profondément actuelle en ce sens où en même temps que nous le conservons, nous participons à sa réactualisation et à son invention.

D’abord appréhendé dans son acception matérielle désignant un site, un lieu, un objet, le patrimoine mondial s’est ensuite élargi à une conception immatérielle renvoyant ainsi aux pratiques, rites, traditions propres à un peuple. Pour mieux analyser et comprendre les enjeux en lien avec la protection du patrimoine mondial, il est important de revenir à des définitions précises.

Le patrimoine matériel culturel et naturel

Selon l’article 1 de la Convention concernant la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel (UNESCO, 1972), sont estimés comme patrimoine culturel :

Les monuments œuvres architecturales, de sculpture ou de peinture monumentales, éléments ou structures de caractère archéologique, inscriptions, grottes et groupes d’éléments, qui ont une valeur universelle exceptionnelle du point de vue de l’histoire, de l’art ou de la science,

Les ensembles : groupes de constructions isolées ou réunies, qui, en raison de leur architecture, de leur unité, ou de leur intégration dans le paysage, ont une valeur universelle exceptionnelle du point de vue de l’histoire, de l’art ou de la science,

Les sites : œuvres de l’homme ou œuvres conjuguées de l’homme et de la nature, et zones incluant des sites archéologiques, qui ont une valeur universelle exceptionnelle du point de vue historique, esthétique, ethnologique ou anthropologique.

Selon l’article 2 de la Convention concernant la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel (UNESCO, 1972), sont estimés comme patrimoine naturel :

Les monuments naturels constitués par des formations physiques et biologiques ou par des groupes de telles formations qui ont une valeur universelle exceptionnelle du point de vue esthétique ou scientifique,

Les formations géologiques et physiographiques et les zones strictement délimitées constituant l’habitat d’espèces animale et végétale menacées, qui ont une valeur universelle exceptionnelle du point de vue de la science ou de la conservation,

Les sites naturels ou les zones naturelles strictement délimitées, qui ont une valeur universelle exceptionnelle du point de vue de la science, de la conservation ou de la beauté naturelle.

Le patrimoine immatériel culturel ou patrimoine vivant

Le patrimoine ne peut être uniquement appréhendé selon un prisme matériel. Il est également immatériel et doit également être pris en compte à travers ce prisme. Ainsi l’article 1 de la Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel définit le patrimoine culturel immatériel comme : «les pratiques, représentations, expressions, connaissances et savoir-faire – ainsi que les instruments, objets, artefacts et espaces culturels qui leur sont associés – que les communautés, les groupes et, le cas échéant, les individus reconnaissent comme faisant partie de leur patrimoine culturel. Ce patrimoine culturel immatériel, transmis de génération en génération, est recréé en permanence par les communautés et groupes en fonction de leur milieu, de leur interaction avec la nature et de leur histoire, et leur procure un sentiment d’identité et de continuité, contribuant ainsi à promouvoir le respect de la diversité culturelle et la créativité humaine.»

Protection internationale du patrimoine

Faisant face à des menaces croissantes, du trafic illicite à sa destruction, le patrimoine mondial fait l’objet d’une protection internationale qui a évolué au fil des années. En effet, plusieurs instruments normatifs internationaux apportent un cadre juridique à cette action. L’UNESCO a mis en place un certain nombres d’outils pour assurer cette sauvegarde au premier rang desquels se trouve la Convention pour la protection du Patrimoine mondial de 1972 qui dispose : «Aux fins de la présente convention, il faut entendre par protection internationale du patrimoine mondial culturel et naturel la mise en place d’un système de coopération et d’assistance internationales visant à seconder les Etats parties à la convention dans les efforts qu’ils déploient pour préserver et identifier ce patrimoine» (Convention 1972).

La liste du patrimoine mondial, qui recense, les sites mondiaux d’une valeur universelle exceptionnelle est un exemple paradigmatique des outils de protection du patrimoine mondial.

D’autres outils normatifs existent au sein de l’UNESCO :

  • Convention pour la protection et la promotion des diversités des expressions culturelles (2005)
  • Déclaration universelle sur la diversité culturelle (2001)
  • Convention sur la protection du patrimoine subaquatique (2001)
  • Convention pour la protection du patrimoine mondial culturel et naturel (1972)
  • Convention concernant les mesures à prendre pour interdire et empêcher l’importation, l’exportation et le transfert de propriété illicites des biens culturels (1970)
  • Convention pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé et ses deux protocoles (1954)

A noter que la réglementation internationale existante doit nécessairement s’adjoindre d’une mise en application par les Etats membres dans leur juridiction interne. Ainsi, les Etats parties sont encouragés à prendre des mesures en interne visant à la protection de leur patrimoine. L’application effective de ces principes reste à l’appréciation des souverainetés étatiques. Toutefois, depuis 2015, une mobilisation internationale croissante autour de la protection du patrimoine mondial est à noter.  En Février 2015, une cinquantaine de pays adoptait la résolution 2199 du Conseil de sécurité des Nations-Unies visant à interdire le commerce et le trafic illicite des biens culturels en provenance d’Iraq et de Syrie. 

En parallèle, des campagnes de sensibilisation sont lancés c’est le cas de « Unite4heritage », campagne lancée sur les réseaux sociaux visant à diffuser, principalement à l’attention des jeunes générations, les valeurs de la protection du patrimoine. En décembre 2016, une grande conférence internationale organisée à Abu Dhabi réunit plus de 40 pays autour de la nécessité impérieuse de sauvegarder le patrimoine culturel en danger. La résolution 2347 des Nations-Unies (adoptée en mars 2017) vient quant à elle entériner cette nouvelle conscience collective en créant un fonds international et un réseau de refuges pour les biens culturels menacés.

Comme en témoigne ces mobilisations, la question de la protection du patrimoine mondial est devenu une priorité internationale . La recrudescence des attaques portées à l’encontre de sites culturels ont entrainé une prise de conscience majeure. La zone du Proche-Orient particulièrement touchée par ces destructions, notamment depuis le début du conflit syrien en 2011, sera l’objet d’une étude approfondie.


Pour aller plus loin :

http://whc.unesco.org/fr/apropos/

http://whc.unesco.org/fr/conventiontexte/

http://whc.unesco.org/fr/conventiontexte/

https://ich.unesco.org/fr/convention

https://fr.unesco.org/courier/2017-octobre-decembre/resolution-historique

 

 

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